Peindre la teuf

A l’instar des photographes, les peintres se sont aussi intéressés à la nuit. Fêtards notoires, parfois eux-mêmes DJ, peindre la fête leur permet alors de figer les visages, les corps et saisir l’atmosphère des clubs. Des années 1980 à nos jours, de l’abstrait au figuratif, Art Knowledge et le média de musiques électroniques Dure Vie ont sélectionné pour nous 6 artistes et 6 façons de représenter la nuit.

I Feel…, 2016 Dan Witz

Au commencement, la fête

L’émergence de la musique électronique et de la house aux Etats-Unis a profondément influencé la scène artistique locale.

Habitué du Paradise Garage club gay emblématique de New York, Keith Haring s’inspire du club pour recréer ses soirées festives mettant en avant l’atmosphère joyeuse de la foule. L’artiste ne cherche pas à s’attarder sur l’individualité de chaque danseur mais au contraire à s’efforcer de retranscrire l’énergie collective insufflée par la musique et le dancefloor. Malgré l’absence de visage des protagonistes, l’univers naturellement coloré de Haring et le mouvement créé par ses personnages nous plongent au cœur des nuits new-yorkaises de l’époque. Mondialement connus, les danseurs de Haring cohabitent avec le DJ qui occupe une place centrale dans son univers.

Untitled, 1985 & DJ, 1983 Keith Haring

L’hommage à la fête se matérialise de différentes manières chez les artistes. Le français, Robert Combas dans sa figuration libre fait danser ses personnages au milieu de différents styles musicaux et rend ainsi ses toiles sonores.

House Jungle Techno Hard Rave & Techno Dance, 1995 Robert Combas

Peindre la vie

Loin des univers colorés de Haring et Combas, l’artiste américain Dan Witz nous propose une vision de la nuit réaliste. Sombres, intenses, parfois violentes, ses compositions nous transmettent toute la puissance du dancefloor.

Dans I Feel…, on est marqué par le relâchement des visages et des corps. Yeux fermés, les personnages représentés paraissent pleinement emportés par le son : la composition nous illustre alors ce genre de moments suspendus que l’on vit parfois en teuf ; les secondes s’allongent, la réalité disparaît peu à peu.

I Feel…, 2016 Dan Witz

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Dans une même perspective, plus douce, l’artiste français Jean Claracq se focalise sur un inconnu au milieu d’une soirée.

Peindre la nuit, c’est aussi peindre un espace de liberté. Paisibles, lumineuse mais aussi mélancoliques, ses toiles nous plongent dans une atmosphère ambivalente, entre euphorie collective et solitude apparente.

Arcadia Club, 2019-2021 Jean Claracq

La foule n’est pas le seul sujet traité par les artistes.

Que serait la fête sans les DJs ? A l’occasion du Group Show « Because the night” présenté à la New Galerie à Paris en 2021, Charles Hascoët réalise une série de portraits de DJs. Lui-même DJ au début des années 2000, il souhaitait représenter de grands noms de la scène minimale (Ricardo Villalobos, Sonja Moonear, Zip, …) endormis, sorte de métaphore du silence imposé par la fermeture des clubs en pleine pandémie de COVID.

Série Sleeping DJs, 2021 Charles Hascouët

Il en est de même pour les clubs. En 2022, CONTACT club du quartier de Shibuya à Tokyo a fermé après 6 ans de fêtes. L’artiste japonais Madsaki rend hommage à son lieu favori à travers la représentation d’une des dernières fêtes du club où KUN et FRAN-KEY ont joué en B2B.

The Golden Path, 2022 Madsaki

A travers leurs toiles, les artistes nous offrent la possibilité de vivre ou revivre la fête d’une autre manière. Belles et puissantes, ces œuvres nous permettent également de regarder ces moments de nuit et de se questionner sur leur caractère unique et éphémère.